Quand le Danemark choisit l'indépendance numérique :
Une décision qui fait réfléchir
Le Danemark vient de prendre une décision qui mérite notre attention. En juin 2025, le gouvernement danois a officialisé sa volonté de réduire progressivement sa dépendance aux logiciels Microsoft dans ses administrations. Cette transition vers des solutions open source ne relève ni du militantisme technologique ni d'un rejet dogmatique du propriétaire, mais d'une analyse pragmatique de risques bien réels.
Cette démarche nous invite à nous poser des questions similaires : quelle est notre propre dépendance technologique, et quelles alternatives s'offrent à nous ?
Ce qui a motivé cette transition
Un réveil brutal sur les risques de dépendance
L'événement déclencheur est révélateur : en mai 2025, Microsoft a suspendu l'accès aux outils professionnels de Karim Khan, procureur en chef de la Cour pénale internationale, sur demande de l'administration américaine. Du jour au lendemain, une institution internationale s'est retrouvée privée de ses outils de travail pour des raisons géopolitiques.
Cet incident a fait prendre conscience au Danemark qu'une dépendance totale aux infrastructures technologiques étrangères représentait un risque pour la continuité de ses services publics. Une leçon qui dépasse largement les frontières du service public.
Une réalité économique préoccupante
Les chiffres danois parlent d'eux-mêmes : entre 2018 et 2023, les coûts des services Microsoft ont augmenté de 180% pour les administrations, passant de 2,8 à 49,2 millions d'euros. Cette inflation n'est pas spécifique au Danemark - elle touche toutes les organisations qui utilisent ces services.
À Aarhus, deuxième ville du pays, la transition vers des alternatives open source a permis de diviser les coûts par quatre : de 73 000 à 20 000 euros annuels. Au-delà de l'aspect financier, cette économie témoigne d'une reprise de contrôle sur les dépenses technologiques.
Les questions pratiques que cela soulève
L'accessibilité des solutions alternatives
Quand on évoque les logiciels open source, la première réaction est souvent : "c'est compliqué". Cette perception s'explique en partie par une réalité : historiquement, beaucoup des meilleurs développeurs contribuent effectivement à l'open source, créant parfois des outils techniquement excellents mais peu accessibles aux non-informaticiens.
Cette situation évolue. La communauté open source a pris conscience de cette limitation et investit désormais massivement dans l'amélioration de l'expérience utilisateur. Les nouvelles générations de logiciels libres proposent des interfaces de plus en plus intuitives, sans sacrifier leurs avantages techniques.
Le Danemark n'improvise pas : sa transition prévoit formation, accompagnement personnalisé, et maintien d'alternatives en cas de difficultés. Une approche méthodique qui reconnaît les défis réels de ce type de changement.
La question de la compatibilité
Les préoccupations sur la compatibilité des fichiers sont légitimes. Dans un environnement professionnel, il faut pouvoir échanger avec clients, fournisseurs et partenaires qui utilisent différents outils.
Les solutions open source modernes gèrent généralement bien les formats standards. Cette compatibilité s'améliore constamment, d'autant que les standards ouverts facilitent l'interopérabilité entre différents logiciels.
L'évaluation des coûts réels
Au-delà du prix des licences, toute transition implique des coûts : formation, accompagnement, adaptation des processus. L'expérience d'Aarhus montre que ces investissements s'amortissent rapidement grâce aux économies récurrentes sur les licences.
Plus fondamentalement, cette approche permet de retrouver une prévisibilité budgétaire. Fini les hausses de prix imposées ou les changements de politique tarifaire - vous reprenez la main sur vos coûts technologiques.
Ce que l'open source change concrètement
Une vraie maîtrise de vos données
Avec les logiciels open source, vous choisissez où stocker vos informations et qui y a accès. Cette autonomie prend une dimension particulière quand on voit des comptes professionnels suspendus pour des raisons extérieures à votre activité.
Plus de transparence dans les évolutions
L'open source documente publiquement ses évolutions, ses corrections et ses roadmaps. Même si vous utilisez une solution hébergée (comme le font la plupart des utilisateurs aujourd'hui), vous bénéficiez de cette transparence. Et surtout, vous gardez toujours la possibilité de reprendre la main : changer d'hébergeur, installer sur votre infrastructure, ou adapter le code à vos besoins.
Un écosystème économique plus diversifié
Investir dans l'open source, c'est soutenir un écosystème d'entreprises locales spécialisées dans l'accompagnement, la formation et l'adaptation de ces outils. Plutôt que de concentrer vos dépenses technologiques chez quelques géants, vous contribuez à une économie numérique plus équilibrée.
Les atouts français pour cette transition
La France dispose d'un écosystème mature pour accompagner ce type d'évolution :
- Des entreprises spécialisées qui maîtrisent ces technologies et comprennent les enjeux métier
- Des exemples probants : la Gendarmerie Nationale utilise des solutions open source depuis des années, plusieurs collectivités ont franchi le pas avec succès
- Une sensibilité croissante aux questions de souveraineté numérique et de maîtrise des coûts
- Des compétences techniques reconnues qui peuvent adapter ces outils aux spécificités françaises
L'enseignement danois
L'approche danoise nous montre qu'il est possible de réduire sa dépendance technologique sans sacrifier l'efficacité. Leur méthode progressive, accompagnée et pragmatique prouve que l'adoption de l'open source peut être un choix stratégique réfléchi.
L'exemple danois soulève une question concrète pour toute organisation : dans un contexte où les coûts logiciels augmentent régulièrement et où la dépendance technologique devient un risque stratégique, les solutions open source méritent-elles d'être sérieusement étudiées ?
Les conditions techniques et économiques sont réunies. Les compétences d'accompagnement existent. Il ne reste qu'à évaluer si cette voie correspond à vos priorités d'indépendance et de maîtrise de votre environnement numérique.
Le Danemark a choisi sa voie. D'autres suivront probablement. La question n'est peut-être plus de savoir si ce mouvement va s'étendre, mais de déterminer quand et comment chaque organisation voudra s'y positionner.
Chez Dokos, nous avons fait le choix de l'open source dans le domaine de la gestion d'entreprise. Cette philosophie guide notre approche : offrir à nos clients la liberté de choisir leurs outils en fonction de leurs besoins réels, sans subir les contraintes commerciales des éditeurs propriétaires.
Sources :
- Clubic - "Le Danemark claque la porte à Microsoft" (12 juin 2025)
- Usine Digitale - "Copenhague et Aarhus divorcent avec Microsoft" (4 juin 2025)
- Generation-NT - "Le Danemark passe à Linux et LibreOffice" (15 juin 2025)
- It's FOSS News - "Denmark Ditches Microsoft for Open Source" (13 juin 2025)