L'open-source Expérience 2025
Les 10 et 11 décembre 2025, nous étions présents à l'Open-source Experience en tant que partenaire Orange. Plus de 4000 professionnels s'étaient réunis à la Cité des Sciences, et l'ambiance était particulière cette année.
Pas l'effervescence d'un salon tech classique. Plutôt l'atmosphère d'un tournant qui se prend collectivement.
Les DSI que nous avons rencontrés ne cherchaient plus à comprendre "pourquoi l'open-source". Ils cherchaient à comprendre "comment faire" pour reprendre progressivement la maîtrise de leur système d'information.
Et cela change tout.
Une prise de conscience qui mûrit depuis plusieurs années
Juin 2025. Audition parlementaire.
Question directe à Microsoft France : "Que se passe-t-il si les autorités américaines demandent l'accès aux données hébergées en France ?"
Réponse franche : "En cas d'injonction judiciaire américaine fondée, Microsoft est légalement contraint de transmettre les données."
Ce n'était pas une provocation. Juste un constat juridique. Le Cloud Act, cette loi américaine adoptée en 2018, permet aux autorités US d'accéder aux données hébergées par des entreprises américaines, même quand ces données sont physiquement stockées en Europe.
Pour beaucoup de responsables informatiques, cette déclaration a simplement confirmé ce qu'ils pressentaient. Et elle a accéléré une réflexion déjà engagée sur la souveraineté numérique.
💡 À retenir
Le Cloud Act permet aux autorités américaines d'accéder aux données hébergées par des entreprises US, même si ces données sont physiquement en Europe.
Orange : un exemple qui inspire
Parlons d'Orange, notre partenaire pour cet événement.
Orange, c'est 40,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires, 310 millions de clients dans 26 pays, des infrastructures télécoms critiques qui ne peuvent pas se permettre la moindre défaillance.
Et pourtant, Orange a fait le choix de l'open-source pour ses infrastructures critiques.
Aujourd'hui, ce sont 50 plateformes OpenStack qui tournent en production. Pas des expérimentations, pas des projets pilotes. Des systèmes qui gèrent des millions d'interactions chaque jour.
Le groupe a annoncé la migration progressive vers Red Hat OpenShift pour 75 points de présence cloud dans les prochaines années. Plus de 30 fonctions télécoms essentielles fonctionnent déjà sur des technologies open-source : SD-WAN, voix, content delivery network, roaming.
📊 Orange en chiffres
- 50 plateformes OpenStack en production
- 75 points de présence cloud prévus (Red Hat OpenShift)
- 30+ fonctions télécoms sur open-source
Ce qui est remarquable, c'est qu'Orange n'est pas simplement utilisateur. Le groupe participe à la construction d'un écosystème open-source européen robuste.
Au-delà des infrastructures télécoms, Orange a également fait le choix de l'open-source pour ses logiciels métier. Dans le cadre de notre projet Conectt avec Orange, nous accompagnons le groupe sur le déploiement d'ERPNext en production. Dokos intervient comme intégrateur et expert de cette solution.
Pourquoi ce choix ? Parce qu'à cette échelle, la flexibilité, la maîtrise technique et la souveraineté sur ses infrastructures deviennent des enjeux stratégiques.
Orange a besoin de pouvoir adapter ses outils, de ne pas dépendre d'un éditeur unique, et de garder le contrôle sur ses données sensibles.
Comprendre les enjeux du Cloud Act
Il est important de bien comprendre ce que signifie concrètement le Cloud Act pour les entreprises françaises.
Les principaux fournisseurs cloud mondiaux - Amazon Web Services, Microsoft Azure, Google Cloud - sont américains et donc soumis au droit américain, quel que soit l'emplacement physique des données. Cette réalité place une part considérable des infrastructures numériques européennes sous juridiction américaine.
Prenons un exemple concret : le Health Data Hub français a dû héberger des données de santé sur Microsoft Azure, malgré les réserves exprimées par la CNIL. À l'époque, en 2019, l'argument était qu'il n'existait pas d'alternative européenne suffisamment mature.
Ce n'est pas une question de confiance ou de méfiance envers ces acteurs. C'est une question de cadre juridique.
Ces entreprises sont excellentes dans ce qu'elles font. Mais elles évoluent dans un contexte légal qui peut entrer en conflit avec nos propres réglementations européennes, notamment le RGPD.
La vraie question n'est pas "où sont vos serveurs". C'est "qui peut légalement y accéder".
Ce que l'open-source permet vraiment
L'open-source n'est pas une idéologie. C'est une approche technique qui répond à des besoins très concrets.
La transparence et la maîtrise
Quand le code source est accessible, vous pouvez l'auditer, le comprendre, le modifier si nécessaire. Il n'y a pas de "boîte noire" dans vos systèmes critiques. Vous pouvez faire appel à n'importe quel expert pour vérifier votre infrastructure.
Cette transparence est rassurante, surtout sur des sujets sensibles.
La réversibilité
Orange est en phase d'étude pour l'utilisation de Mautic (outil de marketing automation). Lorsque leur intégrateur initial a pivoté vers une offre propriétaire, Orange a pu changer de partenaire et basculer chez Dropsolid, sans migration complexe ni dépendance contractuelle. C'est ça, la réversibilité : ne jamais être prisonnier d'un prestataire parce que la solution reste ouverte.
La souveraineté juridique
En choisissant une solution open-source hébergée sur une infrastructure française ou européenne (sans lien capitalistique avec des acteurs américains), vos données restent sous juridiction européenne, protégées par le RGPD.
C'est un point important pour les secteurs réglementés ou pour les entreprises qui manipulent des données sensibles.
Un écosystème qui se structure
Ce qui a changé ces dernières années, c'est la maturité de l'écosystème européen.
📈 Marché français de l'open-source
6 milliards d'euros (2022)
Soit 11% du marché numérique
Croissance supérieure à la moyenne du secteur IT
Le marché français de l'open-source représentait 6 milliards d'euros en 2022 (soit 11% du marché numérique), avec une dynamique de croissance supérieure à la moyenne du secteur IT. Ce n'est plus un secteur de niche. C'est un pan entier de l'économie numérique qui se structure.
Des initiatives publiques voient le jour : le projet NUBO en France, un cloud interministériel basé sur OpenStack ; le Sovereign Cloud Stack en Allemagne ; l'initiative SovereignEdge.eu au niveau européen.
Le Land allemand de Schleswig-Holstein a finalisé la migration de plus de 40 000 comptes de messagerie gouvernementaux depuis Microsoft Exchange vers des solutions open-source. C'est un projet de grande ampleur, mené méthodiquement, qui montre que c'est possible.
En France, des entreprises de toutes tailles utilisent déjà des solutions open-source en production : Décathlon, BackMarket, Norauto, Mirakl.
Pas par idéologie. Parce que ces solutions répondent à leurs besoins.
Notre démarche chez Dokos
C'est dans ce contexte que nous avons développé Dokos, une adaptation française d'ERPNext pour la gestion d'entreprise.
Notre conviction est simple : il est possible de gérer une entreprise avec des outils performants, éthiques et souverains. Vous n'avez pas à choisir entre efficacité et maîtrise de vos données.
Vos données vous appartiennent et restent là où vous le décidez.
Nous ne prétendons pas révolutionner quoi que ce soit. Nous contribuons simplement à un mouvement plus large : celui d'entreprises qui reprennent progressivement le contrôle de leurs outils numériques.
Une invitation à la réflexion
Si vous êtes arrivé jusqu'ici, c'est probablement que ces questions vous concernent.
Peut-être que vous vous interrogez sur votre dépendance à certains éditeurs. Peut-être que vous vous demandez où sont réellement vos données et qui peut y accéder. Peut-être que vous cherchez simplement à comprendre si l'open-source peut répondre à vos besoins.
Ces questions sont légitimes. Et complexes.
Nous ne prétendons pas avoir toutes les réponses. Mais nous sommes convaincus qu'échanger, partager les retours d'expérience, et se poser les bonnes questions est déjà un premier pas important.
Alors voici une dernière question : dans 5 ans, voudrez-vous toujours dépendre d'éditeurs dont vous ne maîtrisez ni les décisions, ni les tarifs, ni la juridiction ?
Si vous souhaitez en discuter, que ce soit pour comprendre ce que fait Dokos ou simplement pour échanger sur ces enjeux de souveraineté numérique, nous sommes là pour ça.
Pas pour vous convaincre de quoi que ce soit. Juste pour accompagner ceux qui se posent les mêmes questions que nous.